
Bon après pas mal de discussions et tergiversations je me décide et j’emmène faire à Moumoune le voyage de sa vie….. 😉
J’aurais pu lui faire découvrir les lacs du Canada, ou les steppes de Sibérie, voir même faire un road trip aux sommets du Tibet… Mais c’est tellement commun, tellement touristique, moi ce que je voulais c’est lui en mettre plein la vue. 😎
Alors je décide de l’embarquer pour l’aventure au départ de de Lyon.
Moi j’organise le truc. Je s’occupe de tout et toi tu s’occupes de rien. La répartition des rôles est donc facile à définir.
Il a donc fallu négocier, expliquer :
– Moumoune, pose ton vendredi après midi et on décolle pour le paradis. Je t’explique me programme. On passe récupérer tes affaires à ta maison et on met les voiles vers 12h30-12h33. Je t’emmène faire le voyage de ta vie.
Bon ben j’avais oublié qu’une fille ça doit se préparer 😯 …… Elle a pris sa douche, a fait son sac pour partir. Sachant que je n’ai qu’un top case pour un week-end… l’autre elle a cru qu’on avait un camion d’assistance du Paris-Dakar qui nous suit…. Elle a pris 2 jean’s, 2 shorts, 5 tee-shirt, 20/25 culottes, 18 paires de chaussettes. Puis elle s’est attaquée à la trousse à toilette….
C’est là ou j’ai commencé à pleurer. 😥
– Mais Moumoune, on part 1 jour voir 2 max. Penses-tu que le semi-remorque d’affaire soit nécessaire ?
– Ta gu…e, c’est qui l’homme ? .
Je me suis révolté. Pas le choix, mon honneur était en jeu. Elle m’a lancé un regard qui ne laisse pas beaucoup de place à la discussion. Je me suis senti sali et humilié mais je suis resté digne. J’ai dit oui de la tête mais en croisant les doigts dans le dos.
On décolle enfin après pas mal de négociation pour le matériel à prendre. Il est…. 12h35 à sa montre, 14h30 selon la police.
Direction Annecy en passant par les petites routes depuis Lyon.
La première partie de la route se passe sans grand intérêt. On a un système d’intercom, on a pu échanger nos points de vue et nos états d’âmes sur la guerre au Pakistan et sur les cours de la bourses qui fluctuent beaucoup ces derniers jours.
Enfin on arrive à Aix-les-bains par la D991. On arrive par le nord du lac et la vue est vraiment agréable. On découvre un coin qui nous a enfin fait commencer ce week-end.
En fait depuis le nord d’Aix on a récupéré la D991, qui par la suite se prolonge en D1201 en menant à Annecy. On est arrivé au col de Chambotte avec une vue superbe sur le lac d’Aix. Hummm le week-end s’annonce bien.

Une petite nuit à Annecy et un plat typique avalé (salade pour moi, si c’est vrai, et tartiflette pour elle), nous voila repartis le lendemain.
Toute la nuit j’ai préparé aux petits oignons l’itinéraire. J’ai fait du repérage avec les cartes et internet. J’ai acheté un guide du routard bref je suis fin prêt. Je démarre la moto et suis prêt à avaler des kilomètres de bitume et de terre. Je suis « ready to race » (oui je sais, c’est pas le slogan de chez Honda mais là dans le contexte…. j’aurais pu faire une citation latine aussi mais bon ).
Une douce et harmonieuse voix me tire de mon départ pour le Dakar :
– Mon chéri, on va prendre un café dans Annecy ? J’ai repéré hier soir une boutique de bijou typique de cette région pittoresque et j’aimerais m’y arrêter.
Diantre que faire ? Me révolter et lui dire qu’il est déjà 10h20 et que Peterhansel à pris une avance considérable sur nous et que l’on a 6 cols à passer dans la journée et que je suis pas super chaud et que j’ai mal au doigt de pied….
Oui la révolte est grande et je me dois de réagir :
– Ok
Enfin on part. J’ai arrêté de regarder l’heure. Je suis trop dégoutté, écoeuré que je suis.
On décolle d’Annecy pour se rendre au Col des Aravis.
On longe donc un peu le lac vers le sud, puis on emprunte la D909 et on file.

A non il faut s’arrêter à la coopérative de fromage de Thones. Mme est amatrice. Elle prend quoi… un reblochon. Qu’elle enferme dans le top case avec nos affaires. C’est sûr que là pour le plan drague….
Imaginons la situation suivante, tu roules, la route est belle, la journée est belle, ta moto est belle et là soudain-coup, tu rencontres une motarde sur la route, qui est en pérille. Toi faisant appel à ton légendaire courage et ta bravoure tu voles à son secours….
Tu as déjà essayé de dragué avec une odeur de reblochon fermier sur les habits ? §snif
Seule solution, reprendre la route. Heureusement pour monter jusqu’au col, elle est vraiment splendide. On n’a pas grand-chose à dire. On en prend plein la tête avec des paysages de montagne grandiose. Je reste sans voix (elle aussi, ouf… !) au détour d’un virage juste à côté du Château de Menthon St Bernard. Une vaste plaine et une route remplie de soleil. Le pied.
On arrive au Col des Aravis. Des motards de partout mais que c’est beau la haut. On a une vue imprenable sur le Mont Blanc.


On repart et je me prends un fou-rire. Je vois un couple assied sur des fauteuils de camping face au mont blanc. Elle tricote, lui lit l’Equipe.
Avec toute la délicatesse qui est une religion dans ma famille depuis des générations, je fais la remarque à Moumoune que ces gens pourraient un jour être nous, après une vie de labeur faite de bonheur et de joie.
Sa réponse m’a tellement offensé que je n’ose te la retranscrire de peur de me faire censurer.
En redescendant le col, on s’arrête à la Giettaz pour déjeuner.
C’est assez simple, il y à deux restos. Au vue de l’heure (14h30) il reste le snack/boulangerie/fromagerie/boucherie/charcuterie/glacier/pizzeria, ouvert. On se fait un arrêt avec assiette de produits régionaux. Je repère une table qui donne en plein sur un super virage à droite dans la descente. Le spectacle est top. Je vois passer des ribambelles de motards et j’adore. Moumoune doit certainement me parler de ces derniers bigoudis achetés à carrefour mais j’écoute pas, je préfère le spectacle.
Le spectacle additionné au repas fait qu’on (je) passe un super moment.
J’essaye malgré tout d’apprendre à Moumoune la différence de son que fait un moteur 2, 3 et 4 temps. Pourquoi ai-je entrepris une telle chose ? §heu
Bref on continue notre périple en direction de Flumet.
La on se dirige alors vers Les Saisies. La route est vraiment un pur moment de détente et de plaisir que l’on essaye de partager. Moi je pilote comme un semi-dieu (selon moi), comme un mec qui a peur (selon Moumoune). Mais que c’est beau. On en prend plein les yeux chaque virage chaque morceau de bitume est à tomber. Les paysages défilent dans un plaisir infini. Cette moto sur cette route c’est vraiment un vrai régal.
En traversant les saisies, on croise la route de deux gendarmes qui procèdent au contrôle d’un… motard. Il a l’air dépité. Alors le salut se fait discret mais bon je suis triste pour lui.
Moumoune est sans cœur, elle rit. La vilaine. §bandit
On passe par Hauteluce. C’est toujours aussi beau. On reste sur la D2188. Mais je vois dans mon viseur une série de virage qui ne demande qu’à nous faire voyager encore plus loin. On emprunte cette route (la D925) et on file en direction de l’inconnu.
On décide de s’arrêter un instant car la vue nous laisse vraiment encore sans voie. Le barrage de Roselend est une chose que je ne connaissais pas et qui me pète à la figure mais quelque chose d’assez violent. On ne sait pas quoi dire tellement c’est beau!!
On reste planté là à regarder et à partager ce moment.
On continue notre route en direction du Cormet de Roselend. On en prend plein la figure.
Moumoune qui rentre de 3 semaines en Mongolie me dit qu’elle a le sentiment d’y être à nouveau avec ce coté steppe sauvage et c’est vaste pleine. Elle est aux anges. On est réduit aux onomatopées.
Je t’avais dit que j’allais te faire voyager….





On reste comme deux c..s à admirer ces paysages sans fin et à se dire que c’est magnifique. §aime
La fin de journée approchant, le choix devient cornélien. On rentre à Lyon ? On se dit qu’on a de la chance car pour la garde des enfants on a pas à s’en faire, puisqu’on en a pas. Idem pour les animaux. Bon bein on continue.
Je regarde sur la carte et je vois se dessiner une ville magnifique. Elle semble promettre un moment de détente et de tranquillité après autant de plaisir. On imagine, être accueilli comme des héros dans un petit village de montagne qui ne reçoit la visite de presque personne. Une farandole de fleur et le village qui nous honore comme il se doit. Alors cap vers…..Moutiers.
La claque. On revient dans le passé. Elle fait ville sinistrée. C’est vraiment pas top. Les bâtiments sont moches et les gens bizarres.
On est allé au resto et ce fut un moment magique.
A la carte on voit qu’ils ont du poisson, étant un fervent défenseur des droits des animaux, on se décide à se faire plaisir.
Nous hélons le serveur et lui tenons à peut près ces propos :
– Dites moi Monsieur le serveur émérite, j’ai vu que vous proposiez du poisson à la carte, auriez vous la gentillesse de me conter la façon dont celui-ci à cuit ?
– Ben à la poêle avec une sauce. Je crois.
– J’ai vu également que vous aviez des pommes de terres coupés en lamelles et cuite dans un bain d’huile autour de 160 degrés. Oui comme vous dites des frites. SOnt elles maison?
– Ben elles sont pas maison, elles sont fraîches.
On a préféré arrêté là notre questionnaire de la gestapo pour commander rapidement et rentrer à l’hôtel.
Dernier jour de notre périple. Je passe encore la nuit à chercher notre meilleur itinéraire. Je fais une danse du ventre pour éviter la pluie ( je veux voir personne imaginer la scène. Je me suis assez rendu ridicule tout seul…). Bref on repart le lendemain prêt à affronter la route sans avoir peur de quoi que se soit. Des vrais héros.
Sur la N90 en direction de Lyon, je vois un petit panneau que seule ma vue d’aigle a permis de repérer. What else’s ?
« Col de la madeleine – 26km ».
26km… c’est quoi dans la vie d’un homme ? D’une Africa Twin ?
– Moumoune, prépare-toi à vivre les 26km les plus passionnants de ta vie. Tu vas kiffer et tu vas mouiller la culotte tellement ça va être pétillant .
– Ben moi je m’en fiche je suis derrière toi, tu vas bien ou tu veux ».
Ni une, ni deux, je chope les freins, faits demi-tour et hop je retourne sur mes pas. La s’ouvre devant moi la D213 en direction du Col de la Madeleine. Heu… j’avoue que j’ai un poil le vertige sur certains passages mais au final qu’est-ce qu’on a pris dans la tête….. Oui j’avoue que j’ai le vertige et quand dans une montée, il y a à droite un muret de 50cm de haut à moitié pété et à gauche un vide conséquent. Il faut prier fort de ne pas avoir peur.
Pour ceux qui l’ont jamais fait, il est urgent d’y aller. C’est à couper le souffle. On est dans un monde minéral qui vous dit que là vous n’êtes plus grand-chose et que c’est la nature qui prend le dessus. Je me rends compte que j’ai un moment de plaisir intense en voyant ces paysages et ces roches de partout. J’ai un sourire bête à chaque virage, à chaque portion de route. Moumoune est enfin aphone et je peux écouter le plaisir du ronronnement du moteur mélangé à celui de l’air qui file dans le casque et surtout cette paix qui vous envahit et que j’étais venu chercher.


On s’arrête en haut. On est à 2000m. On fait la photo officiel comme des japonais.

On doit être 50/60 motards. On se regarde, se jauge et au final on a tous le même regard. Celui du plaisir d’avoir fait cette ascension et ce plaisir de se poser devant une tarte aux myrtilles maison. Qui au demeurant reste la meilleure tarte que j’ai jamais mangé. Moumoune profite de mon arrêt aux toilettes pour boulotter les 2/3 tiers et me dire que c’est un gars qui est venu lui parler pendant que son pote à subtiliser le reste de la tarte….. et qu’elle est toute malheureuse.
Face à la mauvaise foi on n’a que deux solutions, des claques dans le museau ou l’ignorance….
Alors tel un prince je reprends ma monture et lui dis avec la plus grande virilité qui s’impose dans de telles circonstances….
– Alors tu viens ! On y va, s’il te plaît ! ».
On repart sur La Chambre (pas d’esprit mal placé. C’est une vraie commune).
La descente du Col est moins marquante de ce côté mais reste très beau. On se régale et on commence presque à trouver du plaisir à être sur la machine tous les deux. Moi dans le rôle de celui qui maîtrise sa machine. Elle dans la spectatrice qui n’a d’yeux que pour moi. (Elle est pas là, je dis ce que je veux).



On rentre enfin à Lyon en passant par la nationale. On est tout content de ce périple. C’était ma première vraie virée dans les Alpes et pas la dernière. Quand j’ai regardé les constantes de la moto, on a fait sur les 3 jours 650 km. Conso de 4,9l/100km. 17H00 de moto en tout. Mais au fond les chiffres n’ont que peu d’intérêt face à autant de plaisir vécu ensemble.
Je recommande à tous d’aller voir le Cormet et le col de la madeleine. C’est grandiose et sans vraiment de comparaison possible !
Et puis de toute façon j’aurais jamais pu rattraper Peterhansel….